La marginalité des métiers d'art

Nous avions initié il y a un an des articles sans prétention sur les métiers d’art, tout droit venus de notre ressenti. Et il y a matière! Reprenons donc le fil de cette réflexion, à quelques jours des JEMA 2019. Au moment où les médias s’apprêtent à communiquer sur les artisans d’art, le grand public à envisager de venir à notre rencontre, à quoi pouvons-nous nous attendre en 2019?
Il nous semble que, si la fameuse question “Vous en vivez?” reste et restera un incontournable des visiteurs, l’effervescence (pour ne pas dire l’échauffement) actuelle du climat français est peut-être une opportunité exceptionnelle de parler de notre vie, comment nous vivons, comment nous “en” vivons, comment nous faisons face à la vie avec ces métiers marginaux.
Ayant essayé de décrypter les expressions les plus diversifiées, de capter toutes les prises de conscience de notre société depuis un an, il nous semble que notre cause avance sensiblement. Mais sommes-nous objectifs? Nous essaierons donc d’évoquer pendant quelques jours tous les signes que nous avons pu relever, qui parfois parlent des métiers d’art sans le savoir: l’émergence d’un mouvement qui redonne sa valeur aux métiers dits “manuels”, la compréhension grandissante d’un mode de vie différent qui compense l’invasion du numérique par le besoin de se confronter à la matérialité ou à l’intégrer à son quotidien, le rejet du jetable (donc l’attrait du durable), la quête de sens pour éviter le burn-out, la quête de valeurs fondatrices contre la fragilité et la dépression, la conscience écologique, la responsabilité des générations d’hier à l’égard des générations de demain, le besoin de reconversion, le recul de l’âge de la retraite qui doit permettre de travailler longtemps en gardant toutes ses capacités et sa joie d’être à la tâche.
Pour aujourd’hui, réjouissons-nous d’une certaine reconnaissance de ce qui pourrait s’appeler une marginalité professionnelle. La marge n’est plus tout à fait la marge. Elle suscite la prudence, en ces temps de remise en question. Je me souviens d’un sentiment d’impuissance lorsque nous évoquions il y a un an, comme une blague, l’idée d’une grève générale des artisans d’art pour exprimer leurs difficultés: qui s’en soucierait? En mars 2019, on sait que c’est éventuellement possible. J’ignore si des artisans d’art ont revêtu des gilets jaunes, s’ils ont participé au Grand Débat, mais ils récolteront obligatoirement les fruits de cette brusque sensibilisation à la marginalité, à l’autre qui n’est pas dans le système ou qui, pour mille raisons, ne vit pas comme la majorité des Français. Encore faut-il - encore et toujours - rappeler notre existence, notre présence dans le paysage économique, la dure réalité de nos métiers qui ne sont pas à proprement parler rentables pour la société, mais qui permettent à tant de personnes de travailler (et donc à ne pas être demandeurs d’emploi, ni salariés en arrêt maladie parce qu’ils n’arrivent plus à supporter leur stress), autonomes, indigents mais heureux. Enfin, on espère que vous l’êtes toujours! ;-)
À bientôt pour la suite...

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